Caractère

Aix vue par...

Solaire, érudite... captivante ! Capitale d'art et d'histoire, la cité de Mirabeau, Cézanne ou Portalis, déploie son aura par-delà la Provence, grâce à celles et ceux qui s'en inspirent et la font rayonner. Témoignages.


Aix esthète avec Jacques Garcia, Architecte d'intérieur

Jacques Garcia - © Eric Sander

Étant particulièrement sensible au patrimoine français et à sa préservation, que vous inspire une ville comme Aix-en-Provence ?

Aix-en-Provence, pour moi représente la quintessence du baroque provençal : toutes ces maisons, tout ces porches, toutes ces portes qui s'inspirent des plus grands dessinateurs du XVIIe siècle... C'est merveilleux.

On dit toujours que la province peut-être en décalage par rapport à la capitale or quand on est à Aix-en-Provence on a le sentiment d'être au coeur d'une capitale. Cette ville continue d'exister et de rayonner grâce à la maintenance de tous ces bâtiments exceptionnels à un Festival international d'art lyrique qui anime, par le plus grand ludisme, les plaisirs d'une ville enchantée.

Aix-en-Provence

Quel est votre meilleur souvenir dans cette ville ?

Mes meilleurs souvenirs sont les moments que je partage avec mes amis lors de cette fête permanente qu'est le festival. Un fête où la recherche du meilleur, du nouveau et de l'extravagance pour la musique classique ne défaillit jamais.

Si Aix-en-Provence était une couleur et une matière ?

Si Aix-en-Provence était une matière, ça serait la pierre avec une couleur très particulière, qui serait un peu ocre et qui ne serait pas très éloignée de la pierre de Jérusalem.

Aix gourmande, avec Margaux Touzet, 5e génération de la pâtisserie-confiserie Maison Béchard

Margaux Touzet - Maison Béchard

Aix est la ville où vous avez grandi, mais également le berceau de l'entreprise familiale depuis plus d'un siècle. Cela doit sceller en vous un fort attachement.

Je suis née ici et au cours de mon enfance j'en ai arpenté toutes les rues et ruelles ! J'apprécie beaucoup sa douceur de vivre, son climat, son centre-ville à taille humaine, ou encore son architecture incroyable. En se promenant, il faut prêter attention aux portes, aux fontaines, et surtout lever la tête pour découvrir ses trésors insoupçonnés !

Sans parler du quartier Mazarin qui abrite désormais des lieux de culture incroyables tels que le Musée Granet et l'Hôtel de Caumont.

Pâtisserie-confiserie Maison Béchard

Quel souvenir d'Aix-en-Provence emporteriez-vous dans votre valise ?

Un des pavés en bronze qui retracent le parcours de Cézanne.

Si Aix-en-Provence était une saveur...

Ce serait l'amande, sans hésiter ! Celle utilisée dans nos calissons.

La transition est toute trouvée avec la pâtisserie Béchard, maison plus que centenaire dont vous perpétuez aujourd'hui le savoir-faire. Comment s'est faite la transmission ?

La première transmission est celle de la gourmandise ! Ensuite, quand je suis arrivée aux commandes, il y avait encore ma grand-mère et mon père, qui incarnaient donc la 3e et 4e génération.

Je me suis familiarisée avec l'univers de la gestion mais j'ai aussi passé beaucoup de temps au laboratoire qui jouxte la boutique. C'est ici que nous confectionnons nos pâtisseries.

Et si vous deviez avoir une pâtisserie préférée ?

J'aime beaucoup l'Alexandre, un gâteau que nous sommes les seuls à proposer puisque c'est mon arrière-grand-père lui-même qui l'a créé. C'est une génoise aux amandes, recouverte d'une fine pellicule de crème au beurre, praliné et saupoudrée d'une peu de sucre glace. Un gâteau très aéré, très léger, qui se mange autant en dessert qu'au petit-déjeuner ou au goûter.

Aix littéraire, avec Annie Terrier, fondatrice des Écritures Croisées

Les Écritures Croisées fondées par Annie Terrier

Il n'a suffit que de quelques secondes d'échange à peine pour qu'Annie Terrier nous plonge dans son incroyable univers. Un monde où la passion pour la littérature est une curiosité jamais assouvie, nourrie par les rencontres avec les monstres sacrés de l'écriture, mais également tout ce que le processus de création littéraire compte d'acteurs. Le cadre de ces rencontres ? Les Écritures Croisées : des débats, des rencontres, des expositions organisés tout au long de l'année autour de thématiques et avec comme point d'orgue, la Fête du Livre, organisée au sein de l'ancienne manufacture d'allumettes d'Aix-en-Provence. Très vite, l'échange s'engage sur milles anecdotes, et les noms fusent : James Baldwin, Antonio Tabucchi, Ismail Kadaré, Satyajit Ray, Octavio Paz... (avant même de recevoir le Nobel de littérature !)

Annie Terrier et Salman Rushdie au Pigonnet

Mais alors les prémisses ? "Les Écritures Croisées que j'ai donc fondées il y a quarante ans plongent leurs racines dans l'histoire d'Aix de la fin des années 70 - En effet, j'appartenais à cette génération, à cet univers culturel alors en ébullition qui s'était construit autour du théâtre, de la musique, de la chanson, des arts plastiques et du livre... Toutes ces années marquées très fortement par la création d'un CAC en 1971 - (Centre d'action Culturelle), structure très originale et tout à fait novatrice et qui rassemblait tous ces acteurs culturels, ces saltimbanques dont je faisais partie - Aix-en-Provence foisonnait d'initiatives. C'était aussi la naissance de maisons d'éditions régionales qui ont acquis très rapidement une grande renommée, Acte Sud, L'Aube, Alinéa, Jacqueline Chambon..." Et puis, la Fête du Livre, dont Annie Terrier a repris le flambeau. "Rapidement, la décision a été prise de l'axer vers la littérature étrangère, tout en continuant d'inviter des écrivains français dont l'oeuvre faisait écho à celle de nos invités."

Un pari réussi puisque cette "épreuve de l'étranger", la première consacrée à la littérature américaine, sera couronnée de succès. Au fil des ans et des thématiques, se succèderont de la place des Prêcheurs, au Palais de Justice et jusqu'à la Cité du Livre des noms aussi prestigieux que Philip Roth, Russel Bank, Carlos Fuentes, ou encore les Nobel, Toni Morrison, Günter Grass, V.S Naipaul, Wole Soyinka, Kenzaburō Ôé, J.M Coetzee... pour ne citer qu'eux. Loin de Saint-Germain-des-Près, voilà donc les tisseurs d'histoire dans la cité de Frédéric Mistral grâce à Annie Terrier et son équipe oeuvrant pour les accueillir avec tout leur univers au sein des Écritures Croisées. Si bien qu'un jour, Toni Morrison conseillera même à Salman Rushdie : "Si tu vas en France, il faut que tu ailles chez Annie". Un passage non pas obligé, mais néanmoins incontournable. Alors, comme tous les invités avant lui, l'auteur de "Furie" posa ses valises au Pigonnet, qu'Annie Terrier, fidèle des lieux et proche de la famille Swellen, avait tout naturellement choisi pour recevoir les plus grands noms de la littérature et des arts, parmi lesquels Henri Cartier-Bresson. «Quelle époque, quelle aventure, c’était extraordinaire». Et déjà, approchant de la fin de notre conversation, la frustration de ne pas avoir connu l’effervescence des Écritures Croisées dont la dernière édition s’est tenue en 2023. Preuve s’il en fallait, que la passion est contagieuse.

Article du 22/08/2024

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